Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/385

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Cécile se leva en tressaillant et recula à quelques pas de Ralph, qui continua à la regarder d’un œil fixe et perçant, sans s’inquiéter du nombre et de la qualité des spectateurs qui les examinaient avec attention.

— Nous ne sommes pas étrangers l’un à l’autre, jeune dame, continua le vieillard, et vous m’excuserez si j’ajoute que la vue d’une connaissance ne doit pas être désagréable à une personne de votre sexe au milieu du désordre et de la confusion qui règnent ici.

— Une connaissance ! répéta Cécile.

— Oui, une connaissance, répondit Ralph. Nous nous connaissons certainement l’un l’autre. Vous me croirez quand je vous aurai dit que je viens de voir dans le corps-de-garde les deux hommes qui vous accompagnaient.

Cécile jeta derrière elle un regard à la dérobée, et vit avec alarme qu’elle avait été séparée de Meriton et de l’étranger. Avant qu’elle eût le temps de faire une seule réflexion à ce sujet, le vieillard se rapprocha d’elle, et lui dit avec une politesse que son costume grossier et négligé rendait plus frappante encore :

— Cet endroit n’est pas convenable pour la nièce d’un pair d’Angleterre ; mais je suis depuis longtemps comme chez moi dans ce village où tout respire la guerre. Suivez-moi ; je vais vous conduire dans un lieu plus digne de votre sexe et de votre condition.

Cécile hésitait ; mais, voyant tous les yeux fixés sur elle avec une curiosité qui avait interrompu tout ce dont chacun s’occupait pour regarder et écouter ce qui se passait entre elle et le vieillard, elle accepta d’un air timide la main qu’il lui offrait, et se laissa conduire en silence, non seulement hors de la chambre, mais hors de la maison. Ils en sortirent par une porte différente de celle par laquelle elle y était entrée, et ils se trouvèrent dans une autre rue, plus tranquille que celle qui était remplie de groupes de soldats.

— Mais où sont mes deux compagnons ? demanda enfin Cécile ; je ne puis aller plus loin sans eux.

— Ils sont sous la garde de gens armés, répondit Ralph d’un air calme, et vous n’avez d’autre alternative que de partager leur détention, ou de vous en séparer momentanément. Si l’on connaissait le caractère de celui qui vous a amenée ici, son destin ne serait pas douteux.