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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 4, 1839.djvu/408

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la couvrit du surtout que Ralph lui avait fait mettre, afin de la préserver du froid de la nuit, et au bout de quelques minutes, il eut le plaisir de voir que, cédant à la fatigue, elle goûtait enfin les douceurs du repos.

La nuit était bien avancée quand ils aperçurent les hauteurs qui s’élèvent au-delà de Dorchester ; Cécile venait de s’éveiller, et Lionel cherchait déjà quelque prétexte plausible pour quitter le chariot sans risquer de faire renaître les soupçons du vieux fermier. Enfin il trouva un endroit qu’il jugea favorable pour exécuter ce projet ; la route était coupée par deux sentiers de traverse ; personne ne se montrait dans les environs, et Lionel allait parler, quand les bœufs s’arrêtant d’eux-mêmes, il vit Ralph devant eux au milieu du chemin.

— Faites place, l’ami ! s’écria le voiturier en avançant vers lui ; ne voyez-vous pas que vous empêchez mes bœufs de passer ?

— Descendez ! dit Ralph à Lionel en faisant un geste du bras.

Lionel obéit sur-le-champ, aida Cécile à descendre, et s’approcha du fermier.

— Vous nous avez rendu un plus grand service que vous ne le pensez, lui dit-il ; prenez ces cinq guinées.

— Et pourquoi ? pour vous avoir fait faire quelques milles sur une voiture de foin ? Ces services-là ne se vendent pas dans cette colonie. Mais dites-moi donc, l’ami, il paraît que l’argent ne manque pas dans votre gousset dans un temps où personne n’en a beaucoup ?

— Eh bien ! mille remerciements ; je ne puis m’arrêter pour vous offrir autre chose.

Au même instant, remarquant les gestes d’impatience de Ralph, il alla le rejoindre, et aidant Cécile à franchir une barrière, ils disparurent tous trois aux yeux du fermier surpris.

— Holà ! holà ! l’ami, s’écria le digne avocat de la liberté en les poursuivant aussi vite que son âge et ses forces le lui permettaient, dites-moi donc, est-ce que vous étiez trois quand je vous ai ramassés sur la route ?

Les fugitifs entendirent les cris du vieux fermier ; mais, comme on peut se l’imaginer, ils ne jugèrent pas à propos de s’arrêter pour lui répondre. Un instant après, un bruit de roues annonça l’approche d’autres voitures qui s’en retournaient. Les cris et les imprécations qui partirent contre le chariot sans conducteur qui