Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 5, 1839.djvu/401

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— Ils approchent de ce côté, dit Duncan au moment où une nouvelle explosion d’armes à feu venait de se faire entendre ; nous sommes trop au centre de leur ligne pour pouvoir agir efficacement.

— Ils vont se diriger vers ce bas-fond où les arbres sont plus épais, dit le chasseur, et nous pourrons alors les prendre en flanc. Allons, Sagamore, il sera bientôt temps de pousser le cri de guerre et de nous mettre à leurs trousses. Je me battrai cette fois avec des guerriers de ma couleur : vous me connaissez, Mohican ; tenez pour certain que pas un Huron ne traversera la rivière qui est derrière nous, sans que le tueur de daims ait retenti à ses oreilles.

Le chef indien s’arrêta encore un moment pour contempler le lieu du combat, qui semblait se rapprocher de plus en plus, preuve évidente que les Delawares triomphaient ; et il ne quitta la place que lorsque les balles qui tombèrent à quelques pas d’eux comme des grains de grêle qui annoncent l’approche de la tempête, lui firent reconnaître que leurs amis ainsi que leurs ennemis étaient encore plus près qu’il ne l’avait soupçonné. Œil-de-Faucon et ses amis se retirèrent derrière un buisson assez épais pour leur servir de rempart, et ils attendirent la suite des événements avec ce calme parfait qu’une grande habitude peut seule donner dans un moment semblable.

Bientôt le bruit des armes cessa d’être répété par les échos des bois, et résonna comme si les coups étaient portés en plein air. Ils virent alors quelques Hurons paraître l’un après l’autre, repoussés hors de la forêt jusque dans la clairière ; ils se ralliaient derrière les derniers arbres comme à l’endroit où il fallait faire les derniers efforts. Un grand nombre de leurs compagnons les rejoignirent successivement, et abrités par les arbres, ils paraissaient déterminés à ne prendre conseil que de leur désespoir. Heyward commença à montrer de l’impatience ; il ne tenait plus en place, et ses regards étincelants cherchaient sans cesse ceux de Chingachgook comme pour lui demander s’il n’était pas temps d’agir. Le chef était assis sur un roc, le visage plein de calme et de dignité, regardant le combat d’un œil aussi tranquille que s’il n’était placé là que pour en être spectateur.

— Le moment est venu pour le Delaware de frapper ! s’écria Duncan.

— Non, non, pas encore, répondit le chasseur ; lorsque ses amis approcheront, il leur fera connaître qu’il est ici. Voyez ! les drôles