Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 5, 1839.djvu/400

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derrière les Hurons ; une balle partit en sifflant du milieu de quelques habitations de castors qui étaient situées dans la clairière, et aussitôt après retentit l’effroyable cri de guerre.

— C’est le Sagamore ! s’écria Œil-de-Faucon en répétant le cri de sa voix de stentor ; nous les tenons maintenant en face et par derrière : ils ne sauraient nous échapper.

L’effet que cette attaque soudaine produisit sur les Hurons ne saurait se décrire. N’ayant plus de moyens de se mettre à l’abri, ils poussèrent tous ensemble un cri de désespoir, et sans penser à opposer la moindre résistance, ils ne cherchèrent plus leur salut que dans la fuite. Beaucoup, en voulant se sauver, tombèrent sous les balles des Delawares.

Nous ne nous arrêterons pas pour décrire l’entrevue du chasseur et de Chingachgook, ou, plus touchante encore, celle que Duncan eut avec le père de son Alice. Quelques mots dits rapidement et à la hâte leur suffirent pour s’expliquer mutuellement l’état des choses ; ensuite Œil-de-Faucon, montrant le Sagamore à sa troupe, remit l’autorité entre les mains du chef mohican. Chingachgook prit le commandement auquel sa naissance et son expérience lui donnaient des droits incontestables, avec cette gravité qui ajoute du poids aux ordres d’un chef américain. Suivant les pas du chasseur, il traversa le taillis qui venait d’être le théâtre d’un combat si acharné. Lorsque les Delawares trouvaient le cadavre d’un de leurs compagnons, ils le cachaient avec soin ; mais si c’était celui d’un ennemi, ils lui enlevaient sa chevelure. Arrivé sur une hauteur, le Sagamore fit faire halte à sa troupe.

Après une expédition aussi active, les vainqueurs avaient besoin de reprendre haleine. La colline sur laquelle ils s’étaient arrêtés était entourée d’arbres assez épais, pour les cacher. Devant eux s’étendait, pendant l’espace de plusieurs milles, une vallée sombre, étroite et boisée. C’était au milieu de ce défilé qu’Uncas se battait encore contre le principal corps des Hurons.

Le Mohican et ses amis s’avancèrent sur la pente de la colline, et ils prêtèrent une oreille attentive. Le bruit du combat semblait moins éloigné ; quelques oiseaux voltigeaient au-dessus de la vallée, comme si la frayeur leur avait fait abandonner leurs nids, et une fumée assez épaisse, qui semblait déjà se mêler à l’atmosphère, s’élevait au-dessus des arbres, et désignait la place où l’engagement, devait avoir été plus vif et plus animé.