Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/112

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sait une chaise devant une petite table placée à côté de la balustrade qui séparait le pasteur de ses ouailles ; et Benjamin, après avoir jeté du bois sur les deux feux, resta debout près de Richard, comme une corvette légère, prête à se porter partout où l’amiral pourrait l’envoyer.

Faire la description de la congrégation, ce serait outrepasser considérablement nos limites, car on y voyait autant de costumes différents qu’il s’y trouvait d’individus ; mais on pouvait remarquer dans la parure des deux sexes quelque chose qui prouvait du moins la volonté que chacun avait eue de s’endimancher de son mieux. À côté d’une femme qui portait sur de gros bas de laine noire une robe de soie conservée avec soin pendant trois générations, une autre étalait un châle brillant de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel, sur une robe conservée par une aiguille industrieuse, en dépit des ravages du temps. Cet homme portait un vieil uniforme des volontaires de l’artillerie, pour rappeler qu’il avait jadis servi dans ce corps ; cet autre une belle veste de chasse dont la blancheur et la légèreté faisaient frissonner ceux qui la voyaient, quoique le gilet qu’elle couvrait, et qui était d’une étoffe grossière de laine brune fabriquée dans le pays, mit à l’abri du froid celui qui le portait. On remarquait plusieurs jeunes gens avec des pantalons bleus, garnis de drap rouge sur toutes les coutures, reste de l’équipement de l’infanterie légère de New-York.

La physionomie de tous les auditeurs offrait une uniformité marquée, surtout à l’égard de ceux qui ne demeurant pas à Templeton, n’avaient pas reçu le poli que le village[1] donnait à ses habitants. On leur voyait à tous une peau basanée, résultat du froid et de la chaleur qu’ils bravaient successivement en s’occupant de leurs travaux, et un air de décence et d’attention généralement mêlé d’une expression d’intelligence et de curiosité. On apercevait pourtant çà et là quelques figures et quelques costumes auxquels cette description générale ne pourrait s’appliquer. Si l’on voyait un visage fleuri et marqué de petite vérole, des jambes

  1. En Amérique le fermier est généralement le propriétaire du sol qu’il cultive. Il vit toujours dans sa ferme. Le pays (c’est-à-dire le pays entièrement défriché) est par conséquent couvert de fermes. On trouve communément une ferme avec ses granges et dépendances pour chaque centaine d’acres de terre. Les villages sont occupés par les hommes de loi, les médecins, les apothicaires, les marchands, les ouvriers, etc., etc.