Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/197

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leur allumer du feu. Elles se levèrent, et firent leur toilette du matin, non sans se plaindre du froid, qui était devenu si piquant qu’on y était exposé même dans l’appartement de miss Temple, quoiqu’il fût garanti de l’air extérieur avec le plus grand soin. Dès qu’Élisabeth fut levée, elle s’approcha d’une fenêtre, tira le rideau, ouvrit les volets, et voulut jeter un coup d’œil sur les environs ; mais une couche épaisse de glace couvrait les vitres comme d’un rideau impénétrable. Elle ouvrit la croisée, et un brillant spectacle s’offrit à ses yeux.

Le lac avait changé sa couverture de neige sans tache pour une surface de glace qui réfléchissait les rayons du soleil levant, comme le miroir le plus pur. Les maisons du village portaient le même costume, mais la glace qui les couvrait brillait, attendu sa position, comme l’acier le plus fin ; et d’énormes glaçons suspendus à tous les toits, et frappés par l’éclat de l’astre qui commençait sa carrière, et qui semblait rejaillir de l’un à l’autre, ressemblaient à des cristaux attachés à des lustres et à des girandoles. Mais ce qui attira encore davantage l’admiration de miss Temple, ce fut la vue des forêts qui couvraient toutes les montagnes des environs : toutes les branches des arbres étaient entourées d’un voile resplendissant ; chaque feuille des pins semblait chargée d’un diamant, tandis que la cime de ces arbres majestueux, s’élevant au-dessus des chênes, des bouleaux et des érables qui composaient leur cour, semblaient des clochers d’argent bien poli, surmontant des dômes du même métal et de diverses hauteurs.

— Voyez, Louise, s’écria Élisabeth, approchez-vous de la fenêtre, et voyez ce changement presque miraculeux.

Miss Grant s’avança vers la croisée, et, après avoir regardé quelques instants avec une attention bien marquée, elle dit à voix basse, comme si elle eût craint que quelque autre que son amie pût l’entendre : — Ce changement est vraiment merveilleux ; je suis étonnée qu’il ait pu s’effectuer en si peu de temps.

Élisabeth se retourna vers sa jeune compagne, et la regarda avec surprise, ne sachant trop ce qu’elle voulait dire ; mais ses yeux, suivant la même direction que ceux de miss Grant, s’arrêtèrent sur un jeune homme qui était en conversation avec son père à la porte de la maison. Il était bien mis, quoique sans luxe et sans prétentions, et il fallut qu’elle jetât sur lui un second coup d’œil pour qu’elle reconnût en lui le jeune chasseur, Olivier Edwards.