J’abandonne enfin mes sillons ;
Le noisetier m’offre un abri propice
Contre les dards des moucherons.
Vous qui voulez faire un achat de terre,
Prenez le chêne, habitant de nos monts,
Ou le sapin à tête altière ;
Je chanterai de même mes chansons.
CHAPITRE XXI.
es chemins d’Otsego, si l’on en excepte les principales grandes
routes, n’étaient guère, à l’époque dont nous parlons, que de
larges sentiers. Les grands arbres croissant jusqu’à côté des ornières
creusées par les roues des voitures interceptaient le passage
des rayons du soleil, qui ne pouvaient y pénétrer qu’en plein midi.
L’évaporation de l’humidité ne s’y opérant donc que très-lentement,
et le sol étant formé jusqu’à une profondeur de plusieurs
pouces par la décomposition de matières végétales qui s’y étaient
accumulées pendant des siècles, il en résultait que le terrain
n’offrait pas un appui bien solide aux pieds des chevaux. D’ailleurs
la superficie en était inégale ; de grosses racines s’élevaient
souvent à plusieurs pouces au-dessus de la terre, et des souches
de pin restant çà et là rendaient le chemin non seulement difficile,
mais même dangereux. Ces obstacles, qui auraient effrayé
des yeux moins exercés, ne donnaient pourtant aucune inquiétude
aux habitants du pays qui y étaient accoutumés, et les
chevaux également habitués à ce genre de chemin trottaient d’un
assez bon pas sur un terrain que les Européens auraient jugé
impraticable. En bien des endroits, des marques faites par la
hache sur l’écorce des arbres voisins étaient la seule chose qui
pût faire reconnaître la route, et de temps en temps une souche
de pin dont les racines s’étendaient à vingt pieds en tous sens en
indiquaient le milieu.