Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/325

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui ne se nourrissent jamais de la chair les uns des autres ; et quand il est à voir brûler le dernier morceau de bois de sa hutte, vous venez le relancer au milieu de la nuit comme des chiens affamés qui suivent la piste d’un daim épuisé de fatigue ? Que voulez-vous de plus ? Je suis seul et vous êtes plusieurs. D’ailleurs je suis venu ici pour pleurer, et non pour me battre ; et si c’est la volonté de Dieu, faites de moi ce qu’il vous plaira.

En finissant de parler, il attisa de nouveau le feu, et sans chercher à profiter de l’obscurité pour se sauver dans la forêt, ce qui ne lui aurait pas été difficile, vu la stupeur dans laquelle étaient encore plongés ceux qui l’écoutaient, il s’avança successivement devant chacun d’eux, comme pour voir quel était celui d’entre eux qui l’arrêterait. Aucun n’osa porter la main sur lui ; mais quand il arriva devant Richard, le shérif, qui commençait à reprendre ses facultés, lui toucha l’épaule, et en s’excusant sur le devoir de sa charge qui l’obligeait à cet acte de rigueur, il lui dit qu’il était son prisonnier. Les constables se réunirent alors autour de lui, et plaçant Natty au centre, ils reprirent le chemin du village, Richard marchant à leur tête.

Chemin faisant, on adressa au prisonnier diverses questions sur ce qui l’avait déterminé à brûler sa hutte, et sur ce qu’était devenu John Mohican ; mais il refusa d’y répondre, et garda pendant toute sa marche un profond silence. Enfin on arriva au village, et le shérif laissa ses constables libres de passer le reste de la nuit comme ils le jugeraient à propos, et retourna chez le juge pour se mettre au lit après avoir tourné la clé d’une prison sur le vieux Bas-de-Cuir en apparence sans amis et délaissé.


CHAPITRE XXXIII.


Apportez-moi ici les fers ! Holà ! vieux coquin, entêté que vous êtes. Ô illustre fanfaron ! je vous apprendrai….
Shakespeare. Le Roi Lear.


La longueur des jours en juillet permit à toutes les parties qui pouvaient s’y trouver intéressées de se réunir à Templeton, long-