Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 6, 1839.djvu/392

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ordonne de vous rendre sans résistance. Et vous, Benjamin Penguillan, je vous déclare prisonnier en vertu de ce mandat d’arrêt, et vous allez me suivre à la geôle du comté.

— En toute autre occasion, monsieur Jones, répondit le majordome en ôtant sa pipe de sa bouche, car il avait fumé tranquillement pendant toute cette scène ; en toute autre occasion je ferais voile de conserve avec vous jusqu’au bout du monde, s’il existait un tel endroit, ce qui ne peut être puisque le monde est rond. Or, voyez-vous, monsieur Hollister, vous qui avez passé toute votre vie sur terre, vous ne savez peut-être, pas que le monde…

— Rendez-vous ! s’écria le vétéran d’une voix si redoutable, que toute son armée fit un mouvement en arrière ; rendez-vous, Benjamin Penguillan, ou vous n’obtiendrez aucun quartier.

— Au diable votre quartier ! répondit Benjamin en se levant du tronc d’arbre sur lequel il était assis, et en jetant un coup d’œil sur le fauconneau dont les assiégés s’étaient emparés pendant la nuit, et sur lequel était établie de son côté la défense de la place. Croyez-vous donc, monsieur Hollister, capitaine Hollister, si vous voulez, puisque je doute que vous connaissiez seulement le nom d’un cordage, à moins que ce ne soit celui de la corde qui servira à vous pendre ; croyez-vous, dis-je, vous qui criez aussi haut que si, monté sur le grand mât d’un vaisseau de haut-bord, vous parliez à un sourd placé sur le tillac, croyez-vous, vous demandé-je encore une fois, que vous ayez mon véritable nom sur votre chiffon de parchemin ? Non, non, un bon marin ne navigue pas sur ces mers sans avoir plus d’un pavillon pour s’en servir au besoin. Si vous voulez arrêter Penguillan, allez chercher l’honnête homme sur les domaines duquel j’ai jeté ma première ancre dans le monde. C’était un gentilhomme, et c’est ce que personne ne pourrait dire d’aucun individu de la famille de Benjamin Stubbs.

— Envoyez-moi le mandat, s’écria Hiram de derrière son arbre ; et j’y mettrai un autrement dit.

— Mettez-y un âne, monsieur le Fainéant[1], et c’est vous qui y serez, répliqua le majordome en examinant le fauconneau et en rallumant sa pipe.

— Je ne vous donne qu’un moment pour vous rendre, s’écria

  1. Toujours jouant sur le nom de Doolittle, Benjamin l’appelle M. Do-But-Little.