ordinairement le nom du propriétaire, comme la patente de Temple ou d’Effingham.
Le major Hartmann descendait d’un homme qui, de même qu’un grand nombre de ses concitoyens, avaient quitté les bords du Rhin pour venir s’établir sur ceux de la Mohawk. Cette émigration avait eu lieu dès le temps de la reine Anne, et leurs descendants vivaient dans la paix et l’abondance sur les rives fertiles de ce beau fleuve.
Fritz ou Frédéric Hartmann avait tous les vices et toutes les vertus, tous les défauts et toutes les qualités, qu’on attribue aux hommes qui ont la même origine. Il était colère, silencieux, opiniâtre, et avait une grande méfiance des étrangers. Son courage était inébranlable, son honneur inflexible, son amitié persévérante. Le seul changement qu’on aperçut en lui était la mobilité de son humeur triste ou joyeuse. Il avait des mois de gravité et des semaines de gaieté. Il y avait déjà très-longtemps qu’il était intimement lié avec M. Temple, le seul homme ne parlant pas allemand qui eût jamais gagné sa confiance. Quatre fois l’an, et à quatre époques à égale distance l’une de l’autre, il quittait sa maison construite en pierres sur les bords de la Mohawk, et faisait trente milles à travers les montagnes pour venir faire une visite au juge. Il restait ordinairement une semaine à Templeton, et avait l’habitude d’employer une bonne partie de ce temps à faire ripaille avec Richard Jones. Cependant chacun l’aimait, même Remarquable Pettibone, tant il avait de franchise, de cordialité, et quelquefois même d’enjouement, quoiqu’il lui occasionnât quelque embarras. Il faisait en ce moment sa visite régulière de Noël, et il n’y avait pas une heure qu’il était arrivé à Templeton quand Richard l’invita à monter dans son sleigh pour aller à la rencontre de M. Temple et de sa fille.
Avant de parler du caractère de M. Grant et de la situation dans laquelle il se trouvait, il est nécessaire de remonter à l’origine des établissements formés dans le district où se trouvait la patente de M. Temple.
Il semble que la nature humaine ait une tendance à s’occuper des besoins de la vie présente, avant de songer à ce qu’exige de nous celle qui doit lui succéder. La religion était une chose à laquelle on ne pensait guère au milieu des premiers défrichements. Mais, comme la plupart de ceux qui vinrent s’établir dans ce