Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/170

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tous les bras étendus, et à sa grande consternation elle vit plusieurs hommes qui s’avançaient à grands pas, et qui marchaient évidemment en droite ligne vers le rocher. Elle en compta quatre, mais elle ne put distinguer qui ils étaient ; tout ce dont elle put s’assurer fut qu’ils n’étaient pas de ceux qui avaient le droit d’être admis dans la forteresse.

Ce fut pour Hélène un cruel moment d’inquiétude. Jetant les yeux sur le troupeau d’enfants effrayés qui l’entouraient, et dont quelques-uns s’étaient accrochés à ses vêtements, elle chercha à se rappeler les histoires de ces héroïnes qui s’étaient illustrées sur la frontière occidentale des États-Unis. Ici, un seul homme, aidé de trois ou quatre femmes, avait défendu pendant plusieurs jours une palissade contre les efforts d’une centaine d’ennemis ; là, les femmes seules avaient suffi pour protéger leurs enfants et les effets de leurs maris absents ; ailleurs, une femme seule avait mis à mort, pendant leur sommeil, ceux qui l’emmenaient captive, et avait reconquis sa liberté en la rendant à ses jeunes enfants. Hélène se trouvait à peu près dans la même situation, et, encouragée par de tels exemples, les joues animées et les yeux étincelants, elle commença à réfléchir à ses faibles moyens de défense et à les préparer.

Elle posta les deux filles aînées près des leviers qui avaient été apprêtés pour faire tomber les quartiers de rochers sur les assaillants : quant aux autres enfants, ils ne servaient qu’à faire nombre, et elle ne pouvait guère en attendre aucun service utile. Pour elle, en commandant expérimenté, elle se réserva la surveillance générale, le droit d’ordonner, et le soin d’encourager ses troupes. Lorsque ses dispositions furent faites, elle en attendit le résultat en cherchant à prendre un air calme et tranquille, afin d’inspirer à ses compagnes la confiance qui leur était nécessaire pour assurer le succès.

Quoique Hélène possédât à un degré éminent ce courage qui prend sa source dans les facultés morales, elle le cédait de beaucoup aux deux filles ainées d’Esther pour une qualité non moins précieuse à la guerre, et qui est le mépris du danger. Élevées au milieu des difficultés d’une vie constamment errante, sur les confins de la civilisation, elles s’étaient familiarisées avec tous les périls des déserts, et promettaient déjà de se distinguer un jour, comme leur mère, par une audace à toute épreuve, et par ce singulier mélange de bonnes et de mauvaises qualités qui auraient