Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 7, 1839.djvu/87

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adroits que les Sioux ne laisseraient pas échapper l’occasion de lui enlever tous ses trésors. Hélène eut beau employer tous ses efforts pour calmer ses craintes, ses frais d’éloquence furent en pure perte, et ils se séparèrent, lui, pour voir tout de suite, par ses propres yeux, ce qui en était et sortir d’une aussi pénible incertitude, et elle pour regagner doucement et sans bruit la tente solitaire devant laquelle elle avait passé avec tant de rapidité quelques instants auparavant.


CHAPITRE VII.


Quoi ! Cinquante d’un coup !
Shakspeare. Le roi Lear.



Le jour avait alors entièrement soulevé le voile qui couvrait l’horizon. L’entrée d’Obed dans le camp à cette heure avancée, et surtout les lamentations bruyantes que lui arrachait la crainte d’avoir perdu le fruit de tant de pénibles recherches, ne manquèrent pas de réveiller la famille du squatter[1] Ismaël et ses fils, ainsi que le frère de sa femme, ce compagnon a l’aspect repoussant, dont nous avons déjà parlé, furent bientôt debout ; et à mesure que le soleil commençait à répandre sa lumière autour d’eux, ils apprirent toute l’étendue de leurs pertes.

Ismaël, les dents fortement serrées l’une contre l’autre, regarda d’abord les chariots immobiles et pesamment chargés ; de la ses yeux se portèrent sur le groupe d’enfants qui, d’un air affamé, se pressaient autour de leur mère, dont le regard sombre annonçait le désespoir ; puis tout à coup il sortit dans la plaine, comme si l’air du camp était trop renfermé pour qu’il pût y respirer librement. Ses compagnons attentifs, qui cherchaient à lire ses projets sur sa physionomie soucieuse, le suivirent dans un morne silence jusqu’au sommet de la colline voisine, d’où la vue s’étendait presque à l’infini sur la plaine ; mais ils ne découvrirent rien qu’un buffle solitaire qui broutait à peu de distance l’herbe

  1. Le squatter comme le Trappeur sont des noms nouveaux en français, mais leur adoption nous semble aider à l’imagination du lecteur à se transporter au milieu des scènes décrites par le romancier.