Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/241

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çaient à s’élever, et le vaisseau à fatiguer en proportion. Il y eut alors deux heures de vigilance inquiète pour Wilder, pendant lesquelles il eut besoin de toutes ses connaissances maritimes pour empêcher que les restes de son bâtiment ne devinssent la proie d’une mer avide. Cependant son habilité consommée réussit à remplir la tâche qui lui était imposée, et précisément au moment où l’on commençait à distinguer à l’est les premiers rayons du jour, les vents et les flots s’apaisèrent à la fois. Durant toute cette période de pénible inquiétude, notre aventurier ne reçut pas le moindre secours de personne de l’équipage, à l’exception de deux marins expérimentés qu’il avait eu soin de mettre au gouvernail. Mais il fit peu d’attention à cette négligence, parce que les circonstances ne demandaient guère rien de plus que son propre jugement, secondé fidèlement, comme il l’était, par les efforts des deux matelots placés plus immédiatement sous ses yeux.

Le jour se leva sur une scène bien différente de celle qui avait signalé l’affreuse horreur de la nuit. Les vents semblaient avoir épuisé leur fureur. Il ne se faisait plus sentir qu’une brise incertaine, et avant que le soleil fût levé, l’agitation de la mer avait fait place à un calme plat. La mer s’affaissa aussi vite que la force qui l’avait soulevée s’évanouit, et lorsque les rayons dorés de l’astre étincelant tombèrent en plein sur l’élément inconstant, il n’offrait plus qu’une surface calme et unie, qui pourtant s’élevait encore doucement par intervalle comme le sein paisible d’un enfant qui sommeille.

Il était encore de bonne heure, et la sérénité du ciel et de l’océan promettait un jour qui permît d’aviser aux moyens de remettre en quelque sorte le vaisseau sous les ordres de l’équipage.

— Préparez les pompes, dit Wilder voyant les marins sortir successivement des différentes positions où ils avaient été cacher leurs inquiétudes pendant les dernières heures de la nuit.

— M’entendez-vous, monsieur ? ajouta-t-il d’une voix sévère, s’apercevant que personne ne remuait pour obéir à son ordre. Sondez la profondeur de l’eau, et qu’on n’en laisse point un pouce dans le bâtiment.

Knighthead, à qui Wilder venait de s’adresser personnellement, jeta sur son commandant un regard oblique de mauvais augure, et échangea avec ses camarades de singuliers coups d’œil d’intelligence, avant de juger convenable de se disposer le moins du monde à l’obéissance ; mais le ton décidé de son chef produisit en-