Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/293

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son redoutable commandant jugeait à propos de prendre part ; j’ose dire que tout est en règle. Je consulterai mon journal : s’il en est ainsi, soit ; sinon, en bien ! il suffira d’envoyer au vaisseau un petit vent de proue, jusqu’à ce que j’aie examiné le Danois, et alors nous aurons tout le temps de régler nos comptes.

En parlant ainsi, le dieu passa rapidement devant les officiers, et tourna son attention sur les soldats de marine qui s’étaient réunis en corps, sentant la nécessité de s’appuyer mutuellement pour soutenir un examen aussi approfondi. Parfaitement au fait de la carrière que chacun d’eux avait parcourue, et craignant intérieurement d’être dépouillé tout à coup de son autorité, le chef du gaillard d’avant choisit dans toute la troupe un nouvel embarqué, et ordonna à ses aides de traîner sa victime sur l’avant du vaisseau, où il croyait pouvoir se livrer aux jeux cruels qu’il méditait, avec moins de danger d’être interrompu. Déjà piqués d’avoir servi de risée à tout l’équipage, et décidés défendre leur camarade, les soldats de marine résistèrent.

Il s’ensuivit une dispute longue, bruyante et animée, pendant laquelle chaque parti soutenait son droit de persister dans la marche qu’il avait adoptée. Des mots, les combattans ne tardèrent pas à en venir à des démonstrations hostiles. Ce fut au moment où la paix intérieure du vaisseau ne tenait pour ainsi dire qu’à un fil, que le général jugea à propos d’exprimer le dégoût que lui avaient inspiré, depuis le commencement, des scènes où la discipline était si outrageusement méconnue.

— Je proteste contre ces menées licencieuses et anti-militaires, dit-il en s’adressant à son supérieur toujours absorbé dans ses réflexions. J’ai donné à mes gens, je l’espère, le véritable esprit du soldat, et on ne peut faire à aucun d’eux de plus grand affront que de porter les mains sur lui, à moins que ce ne soit par voie de discipline. Je préviens donc ici tous ceux qui m’entendent, et je les en préviens clairement, si quelqu’un touche seulement du doigt un de mes gens, il recevra sur-le-champ un coup qui lui apprendra à respecter ma troupe.

Comme le général n’avait pas essayé de modérer sa voix, elle fut entendue de ses soldats, et produisit l’effet qu’on pouvait attendre. Un vigoureux coup de poing, appliqué par le sergent, fit jaillir le sang du visage du dieu de la mer, et prouva sur-le-champ son origine terrestre.

Se voyant obligé de défendre sa fragile humanité, le vigoureux