Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 8, 1839.djvu/371

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— J’en suis certain, répondit celui-ci avec calme.

— Il est de la marine royale, dit sur-le-champ la gouvernante.

— Oui, je l’ai déjà dit.

— Monsieur Wilder, reprit le Corsaire, nous mettrons sa vitesse à l’épreuve, diminuez les basses voiles et remplissez vos voiles d’avant.

Le jeune marin fit un signe de tête pour indiquer qu’il allait obéir, et il se hâta d’aller exécuter les volontés de son commandant. Il y avait une ardeur et peut-être une sorte de tremblement dans la voix de Wilder en donnant les ordres nécessaires, qui formait un contraste remarquable avec le calme qui caractérisait le Corsaire. Ces inflexions inaccoutumées n’échappèrent pas aux oreilles de quelques-uns des plus vieux marins ; et ceux-ci échangèrent entre eux des regards d’une expression particulière ; mais ses paroles ne furent pas suivies d’une obéissance moins prompte que celles qui sortaient de la bouche de leur chef redouté. Les vergues de l’avant furent dressées, les voiles furent gonflées par le vent, et cette masse, qui avait été pendant si long-temps inerte, commença à fendre les eaux. Le vaisseau atteignit bientôt toute sa rapidité, et la lutte entre les deux navires rivaux devint du plus vif intérêt.

L’autre vaisseau était alors à la distance d’une demi-lieue, exactement sous le vent du Dauphin. Un examen plus précis et plus attentif n’avait laissé de doute à personne sur la force et sur la nature de ce bâtiment. Les rayons d’un soleil brillant tombaient à plein sur sa bordée, tandis que l’ombre de ses voiles se réfléchissait au loin sur les eaux dans une direction opposée aux leurs. Il y avait des momens où l’œil pouvait, à l’aide de la lunette, pénétrer à travers les sabords dans l’intérieur du vaisseau, et avoir une idée des mouvemens qui s’y faisaient. On distinguait quelques formes humaines dans différentes parties de ses agrès ; mais, du reste, tout était calme et tranquille, tout indiquait un grand ordre et une discipline parfaite.

Lorsque le Corsaire entendit le bruit que faisaient les vagues en fendant les eaux et qu’il vit l’écume jaillir de tous côtés autour de lui, il fit signe à son lieutenant de venir le joindre sur la poupe. Pendant quelques minutes, ses yeux restèrent fixés sur le vaisseau comme si toute son attention était concentrée pour en examiner la force.

— Monsieur Wilder, dit-il enfin, du ton d’un homme qui venait