Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/237

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sont aussi nombreux que les grains de sable sur le bord de la mer. Le Grand-Esprit avait donné toutes ces terres et toutes ces eaux aux hommes à peau rouge, car il les aimait parce qu’ils sont fidèles à leurs amis, et qu’ils haïssent leurs ennemis, et qu’ils savent comment leur enlever leurs chevelures… La neige a tombé et s’est fondue mille fois depuis que ce don précieux leur a été fait, continua Whittal, qui parlait avec le ton grave d’un homme qui rapporte une tradition importante, quoiqu’il ne fît probablement que répéter ce qu’il avait entendu dire si souvent que le souvenir s’en était gravé dans sa mémoire sans qu’il y pensât ; — et l’on ne voyait encore que des Peaux Rouges chasser l’élan, et marcher sur le sentier de la guerre. Mais alors le Grand-Esprit est devenu courroucé contre ses enfants et s’est détourné d’eux parce qu’ils se querellaient entre eux. De grands canots arrivèrent du côté du soleil levant, et amenèrent dans le pays des troupes d’hommes méchants et affamés. D’abord ces étrangers parlèrent d’un ton doux et plaintif comme des femmes. Ils demandèrent la permission de bâtir quelques wigwams, et dirent que si les guerriers voulaient leur accorder quelques terres, ils prieraient leur Dieu de regarder favorablement les hommes rouges. Mais quand ils furent devenus plus forts, ils oublièrent leurs promesses, et prouvèrent qu’ils étaient des menteurs. Oh ! ce sont de méchants coquins. Un visage pâle est une panthère. Quand il a faim, vous l’entendez pleurer dans les buissons, comme un enfant égaré ; mais si vous arrivez à sa portée, prenez garde à ses dents et à ses griffes !

— Et cette race perverse a donc volé aux guerriers rouges leur pays ?

— Certainement. Ils parlèrent comme des femmes malades tant qu’ils ne se sentirent pas assez forts, et ensuite ils surpassèrent en scélératesse les Pequots eux-mêmes, faisant boire aux guerriers leur eau de feu, et les tuant avec des armes semblables au tonnerre, et qu’ils font avec un métal jaune.

— Et les Pequots ? leur grand guerrier était-il mort avant l’arrivée de ces étrangers d’au-delà des mers ?

— Tu es une femme qui n’a jamais entendu rapporter une tradition, sans quoi tu parlerais mieux. Un Pequot est un chien faible et rampant.

— Et toi, tu es donc un Narrangansett ?

— N’ai-je pas l’air d’un homme ?