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Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/345

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hautes et droites qui soutiennent un dais immense de feuilles que l’air agite doucement ; une douce mélancolie, un silence imposant règnent au sein de ces forêts, et une atmosphère particulière semble reposer sur ces nuages de feuillage.

Tandis que la lumière se joue sur la surface changeante de la cime des arbres, une nuance sombre et peu variée colore la terre. Des troncs morts tapissés de mousse, des masses couvertes de substances végétales décomposées, tombeaux d’antiques générations d’arbres ; des cavités creusées par la chute de quelque tronc déraciné ; le sombre fungus qui croît sur les racines découvertes de l’arbre mourant, quelques plantes élancées et délicates qui cherchent l’ombrage, sont les images qui se rencontrent à chaque pas dans l’intérieur des forêts. L’air y est tempéré, et dans l’été on y trouve une fraîcheur délicieuse qui égale celle des voûtes souterraines, sans avoir leur humidité glaciale. Au milieu de ces sombres solitudes, on entend rarement le pas des hommes ; la course d’un daim bondissant est presque la seule interruption qui frappe l’oreille, tandis qu’on rencontre à de longs intervalles l’ours pesant et la panthère agile accroupis sur les branches de quelque arbre vénérable. À certaines époques, des troupes de loups affamés suivent le daim à la piste ; mais ce sont plutôt des exceptions à la tranquillité du lieu, que des accessoires qui puissent être introduits dans le tableau. Les oiseaux mêmes sont muets en général, ou lorsqu’ils rompent le silence, c’est par des sons discordants, convenables au caractère de leur sauvage demeure.

Deux hommes traversaient la forêt que nous venons de décrire, le lendemain du jour du combat. Ils marchaient, comme d’usage, l’un après l’autre ; le plus jeune et le plus actif montrait le chemin avec autant de justesse et aussi peu d’hésitation que le marin dirige sa course sur les vastes mers à l’aide de l’aiguille aimantée. Le plus jeune était leste, élancé ; il ne semblait ressentir aucune fatigue ; le second était un homme pesant, sa marche dévoilait peu d’habitude de la forêt, et les forces commençaient à lui manquer.

— Ton œil, Narragansett, est une boussole qui ne peut se tromper, et tes jambes un coursier qui ne se fatigue jamais, dit le plus âgé, en appuyant la crosse de son fusil sur un tronc d’arbre, et s’en servant comme de soutien. Si tu marches sur le sentier de la guerre avec la même vivacité que tu emploies dans