CHAPITRE III.
eu d’heures produisirent un grand changement dans les occupations
diverses de notre famille simple et isolée. Les vaches
avaient donné leur lait du soir, les bœufs avaient été débarrassés
du joug, ils étaient rangés sous leur hangar ; les moutons
étaient dans leur bergerie, à l’abri des attaques du loup rôdeur ;
et l’on avait pris soin que tout ce qui était doué de vie fût
enfermé en-deçà des barrières qui avaient été élevées pour le
bien-être et la sécurité commune. Mais tandis qu’on usait d’une
telle prudence à l’égard des choses vivantes, on avait eu la plus
grande indifférence pour ces produits et ces instruments d’exploitation
rurale qu’en d’autres pays on aurait surveillés avec un
soin égal. Les simples tissus sortant des métiers de Ruth étaient
étendus sur la terre, pour blanchir à l’humidité de la rosée et de
la nuit comme aux rayons de l’astre du jour. Les charrues, les
herses, les charrettes, les selles, et autres objets semblables,
étaient laissés dans des lieux assez exposés, comme pour prouver
que la main de l’homme avait des occupations trop nombreuses
et trop urgentes pour employer son temps à des travaux qui n’étaient
pas regardés comme absolument nécessaires.
Content fut le dernier à quitter les champs et les bâtiments extérieurs. Lorsqu’il atteignit la poterne dans les palissades, il s’arrêta pour appeler ceux qui étaient au-dessus de lui, afin de s’assurer si quelqu’un restait encore en dehors des barrières. La réponse ayant été négative, il entra, et tirant après lui la porte, basse, mais pesante, il assujettit de ses propres mains la barre, le verrou et la serrure. Comme c’était une précaution nécessaire chaque nuit, les occupations de la famille n’en furent point interrompues. Le repas du soir fut promptement terminé, et les travaux légers qui sont particuliers aux longues soirées de l’automne