Page:Cooper - Œuvres complètes, éd Gosselin, tome 9, 1839.djvu/365

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— Tu ne viens pas seule, Martha, dit le jeune homme à demi contrarié. Je t’ai dit que ce que j’avais à te communiquer ne devait être entendu que de toi.

— C’est notre Ruth qui m’a suivie ; tu sais, Mark, qu’on ne peut la laisser seule de crainte qu’elle ne retourne dans la forêt, elle ressemble à un faon mal apprivoisé, toujours prêt à s’élancer au premier signal qu’il entend dans les bois. Je crains que nous ne soyons trop éloignés d’elle.

— Ne crains rien : ma sœur caresse son enfant, et elle ne pense pas à fuir ; tu vois que je suis ici pour lui intercepter le passage si elle en avait l’intention. Maintenant parle-moi avec candeur, Martha, et dis-moi si tu étais sincère lorsque tu m’as assuré que les visites du galant d’Hartford te plaisaient moins que la plupart de tes amis ne l’avaient supposé.

— Je ne puis pas désavouer les paroles que j’ai prononcées.

— Mais tu pourrais t’en repentir.

— Je ne mets point au nombre de mes fautes l’indifférence que j’éprouve pour ce jeune homme. Je suis trop heureuse ici dans cette famille pour désirer de la quitter, et maintenant que notre sœur… Mark, quelqu’un lui parle en ce moment !

— Ce n’est que l’idiot, répondit le jeune homme en jetant un regard de l’autre côté du péristyle. Ils causent ensemble, Whittal revient de la forêt, où il a l’habitude de passer une heure ou deux tous les soirs. Tu disais, maintenant que nous avons notre sœur… ?

— Je désire encore moins de changer de demeure.

— Alors pourquoi ne pas rester à jamais avec nous, Martha ?

— Écoute, interrompit la jeune fille qui, bien que convaincue de ce qu’elle allait entendre, tâchait d’éviter, avec la faiblesse naturelle aux femmes, la déclaration qu’elle désirait le plus d’entendre ; écoute, il se fait un mouvement, ah ! Ruth et Whittal prennent la fuite.

— Ils amusent l’enfant…, ils sont auprès des bâtiments extérieurs. Alors, pourquoi ne pas accepter le droit d’y rester toujours… ?

— Vous pouvez vous tromper, Mark, cria la jeune fille en arrachant ses mains de celles de son amant ; ils ont pris la fuite.

Mark abandonna les mains de Martha avec regret, et se dirigea vers le lieu où sa sœur avait été assise. Elle était partie en effet, mais quelques minutes s’écoulèrent avant que Martha pût sérieu-