Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/125

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Inondé d’un soleil radieux qui faisait
Plus verts les vieux massifs et plus blancs les vieux marbres.
A quelques pas, Guignol s’enrouait sous les arbres.
Et le chant des oiseaux dominait tous ces cris.
C’était bien le printemps, un dimanche, à Paris.

Dans le marasme auquel son âme était en proie,
Le poète Olivier souffrait de cette joie.
Tout ce tumulte heureux lui semblait insensé ;
Car il songeait au vide affreux de son passé,
Aux souvenirs flétris de ses amours banales.
Ce jeune avril avec ses grâces matinales,
Ce soleil, ces frissons d’ailes dans les tilleuls,
Ces gens contents de vivre et de n’être pas seuls,
Ces rires, ces gaîtés, cet entrain, cette vie,
Éveillaient en lui-même une cruelle envie.
Cet homme jalousé n’était pas heureux. Non.
— Qu’importe un peu de bruit autour de votre nom ?
Qu’importe le laurier, bien souvent éphémère,
Si quelque blanche épouse ou quelque vieille mère
Ne doit pas de sa main le suspendre au foyer ? ―
Olivier avait pu sans peine se frayer
Sa route ; le bonheur l’avait aidé tout jeune ;
Il avait peu connu la misère et le jeûne,
Et pour qu’il la cueillît la fleur cherchait sa main.