Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/205

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Le corps ossifié de l’ascète immobile ;
Les lianes grimpaient sur son torse engourdi
Que ne réchauffait plus le soleil de midi ;
Et ses yeux sans regard, dans leurs mornes paupières,
Semblaient avoir acquis la dureté des pierres.
Il aurait dû mourir, par la faim consumé ;
Mais les petits oiseaux, dont il était aimé,
Les oiseaux qui chantaient dans les branches fleuries,
Venaient poser des fruits sur ses lèvres flétries.
Et, depuis très longtemps, c’est ainsi que vivait
Le Bouddha vénérable, absolument parfait.

Donc mille et mille fois, et mille fois encore,
La lune qui blanchit et le soleil qui dore
Les forêts, sur son front tour à tour avaient lui,
Sans que se fût distraite un seul instant en lui
Sa pensée, en un songe immuable perdue,
Lorsque dans sa main droite, au ciel toujours tendue,
Dans sa main sèche et grise ainsi que du granit,
Une hirondelle vint, un jour, et fit son nid.

L’extase du Bouddha ne parut point troublée
Par cette confiante et fidèle exilée
Qui, franchissant du vol la montagne et la mer,
Des froids climats du Nord revenait, chaque hiver,