Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t2, 1892.djvu/276

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Chose affreuse ! ils devaient traîner leur agonie
Dans ce champ clos glacé par la bise du nord,
Où la pitié viendrait seulement quand la mort
Aurait enfin cuvé sa sanglante débauche.

Le maréchal devait opérer sur la gauche,
Par la route d’Olmütz, forte position
Prise par Lichtenstein et par Bagration ;
Et Walhubert servait sous lui. — Quelle tuerie !
D’abord ce fut un grand choc de cavalerie,
Et les carrés français, sur leurs quadruples fronts,
Eurent à repousser quatre-vingts escadrons ;
Puis Kellermann, sabrant, nous fit la place nette ;
Et nos vieux régiments, croisant la baïonnette,
Marchèrent, les tambours devant, l’aigle au milieu,
Vers Pratzen, où tonnaient trente bouches à feu.
Quand ces grands mouvements sous le canon s’opèrent,
C’est terrible ! Combien de braves gens tombèrent
Dans cette plaine où rêve aujourd’hui le berger !
Castex, le colonel du treizième léger,
Un officier superbe et de très haute taille,
Fut frappé d’une balle au front, et la mitraille
Enleva d’un seul coup un groupe de tambours.
N’importe ! Sur Pratzen, dont brûlaient les faubourgs
Et dont les grenadiers du czar gardaient l'entrée