Page:Coppée - Œuvres complètes, Poésies, t4, 1909.djvu/46

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écrasé par le lourd capital,
La vie horrible avec la mort à l’hôpital,
Enfin l’affreux tableau de la détresse humaine
Grossie au microscope effrayant de la haine.
Il disait, remontant le cours des temps passés,
Les anciens appétits que n’a point apaisés
La politique avec son infâme cuisine,
Les révolutions, montagnes en gésine,
Accouchant d’un tyran militaire ou bourgeois…
Allait-on se fâcher pour de bon, cette fois,
Et demander son tour, et redresser l’échine ?
Un coup de dynamite à la vieille machine !
On peut vaincre à présent, ― on en a les moyens ! ―
Tout briser, tout détruire… Aux armes, citoyens !…

Et comme les bravos éclataient en tonnerre,
Je vis passer, dans mon esprit visionnaire,
Déguenillés, hurlants, sur des tas de pavés,
Des hommes aux cheveux épars, aux poings levés,
Qui portaient, en roulant leurs yeux d’épileptiques,
Des têtes et des cœurs tout sanglants sur des piques.

L’orateur s’apaisait. Il voyait maintenant
Le triomphe du peuple au lointain rayonnant,
Et, perdant tout à coup sa féroce éloquence,