Page:Coppée - Œuvres complètes, Prose, t3, 1890.djvu/20

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Et depuis deux jours, — deux jours de Juin, trop chauds, à l’atmosphère de bains, trempés de courtes averses, — ils vivaient là, battant les bois du matin au soir, et, avant de se coucher, laissant la fenêtre entr’ouverte pour être réveillés par les pinsons.
Et ils étaient si heureux, si heureux, qu’ils avaient oublié tout leur passé et qu’il leur semblait avoir toujours habité cette chambre rustique. Elle y avait mis le charme de l’intimité, la jolie blonde, en jetant, au retour des folles promenades, son ombrelle sur le couvre-pied du lit, et en posant sur le globe aux fleurs d’oranger son coquet chapeau de grisette.
Déjà il avait eu des maîtresses, mais celle-ci était vraiment la première, la seule qu’il eût aimée ainsi, avec cet abandon, avec cette confiance. Douce, silencieuse, aimante, et si mignonne, avec des yeux tendrement malins ! Il était fou d’elle, fou de l’odeur fraîche qu’elle exhalait, de ses mots d’enfant, de la moue si sage et si sérieuse de sa bouche, quand elle était pensive. Et elle l’aimait si naïvement, et, s’il restait deux jours sans la voir, elle lui écrivait, d’une grosse écriture maladroite, de si adorables lettres,