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histoire.

son interrogatoire. Reconduit à la prison, il demanda qu’on lui laissât quelques moments de repos pour qu’il pût se préparer au supplice. Ce vénérable pasteur était tout prêt ; mais il réclamait quelques heures pour entretenir quelques prisonniers protestants, dont il savait pouvoir être entendu. Il profita de cette occasion solennelle pour les exhorter à la persévérance et leur témoigna sa joie d’avoir été trouvé digne de sceller de son sang la vérité qu’il leur avait prêchée depuis tant d’années. Les mêmes fidèles attestèrent que le bourreau étant venu prendre ce martyr, sur les quatre heures du soir, pour le mener à la place du Breuil, marquée pour le lieu de l’exécution, ils entendirent le pasteur Roger s’écrier : « La voici l’heureuse journée et l’heureux moment que j’avais si souvent désirés ; réjouissons-nous, mon âme, puisque c’est l’heureux jour que tu dois entrer dans la joie de ton Seigneur. » (22 mai 1745.)

Deux jésuites qui devaient l’accompagner s’étant présentés, il les pria de ne point troubler, par des discours qui seraient inutiles, un recueillement et des actes de dévotion qui lui étaient si nécessaires. Il sortit ensuite de la prison en récitant à haute voix le psaume li, et fut conduit au lieu du supplice par cinquante soldats et au bruit de deux tambours, qui ne cessaient de battre. Pendant tout le chemin rempli d’une foule prodigieuse de peuple, il n’y eut personne qui ne lût sur le visage du pasteur Roger son zèle ardent, sa profonde sérénité et la piété sincère de son âme. Tous les catholiques en furent attendris ; les jésuites repoussés en parlèrent avec éloges. Après avoir fait sa prière à genoux au bas de l’échelle, il la monta avec le même air de confiance et de foi qu’il avait toujours montré jusque-là. Son corps demeura