Page:Coquet - De la condition des célibataires en droit français.djvu/12

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seurs de la famille et du mariage par l’amendement Delacroix, exigeant, au nom de la moralité, que les Cinq-Cents fussent, eux aussi, mariés ou veufs. La discussion fut gaie. Dubois-Crancé retrouva l’éloquence de Larevellière, mais il ajouta, de son cru, de hautes considérations : « C’est une plaisanterie de dire que des hommes peuvent n’avoir pas encore senti à 30 ans le besoin du mariage ; tout homme qui, à cet âge, ne sera pas en état de donner la vie à un autre, ne sera pas capable d’être législateur. La classe des célibataires est celle des égoïstes ; c’est là qu’on pourrait trouver, plus facilement qu’ailleurs, les plus fermes appuis du despotisme… Je ne serais point étonné de voir, dans une assemblée composée de célibataires, prêcher le célibat comme une vertu religieuse et engager le peuple à le professer… » Mais Dubois-Crancé rencontra des adversaires : l’un demande une exception en faveur des militaires, l’autre soutient qu’on peut avoir des mœurs et de bonnes mœurs quoiqu’on ne soit pas marié à 30 ans, et son allusion aux confidences du chaste Montaigne soulève les éclats de rire de l’Assemblée. Après le vaudeville, Savary tient l’emploi du héros de mélodrame : « Je crois, s’écrie-t-il, que cet amendement est plus propre à corrompre les mœurs qu’à les épurer. Les ambitieux se marieront à la veille des élections ; ils abuseront de la jeunesse et de la fraîcheur d’une fille et lorsqu’ils seront parvenus au Corps législatif, ils profiteront des subterfuges multipliés que laisse la loi du divorce, pour abandonner cette jeune personne. »

Et vraiment c’est avec plaisir que le chercheur découvre à la fin de cette discussion les paroles pleines de bon sens du citoyen Talot : « Je ne concevrai jamais qu’à défaut de mariage on puisse être exclu du Corps législatif…