Page:Corbière - Le Négrier.djvu/36

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équipage de renégats, rassemblés par l’amour de la rapine et la soif du carnage. À l’âge que j’avais et avec les dispositions naturelles que j’apportais, on ne frémit de rien et on s’abandonne à tout. Cent cinquante matelots, aux yeux hagards, aux larges épaules couvertes de gilets rouges, bouillonnaient, pour ainsi dire, sur le pont de ce navire, dont le platbord était garni de seize caronades de 12. Il fallait entendre ces voix brutales qui se confondaient, ces propos durs qui se croisaient ! Et ces visages de bronze, ces mains goudronnées, cette confusion de paroles, cette bigarrure de couleurs et d’effets ! Tout cela était de l’harmonie pour mes oreilles, mes