Page:Corday - La Vie amoureuse de Diderot.djvu/120

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qui, pour l’en remercier, compose une âpre satire contre lui, ses proches et ses œuvres. Il a le front de lui apporter son ouvrage, dans l’espoir que Diderot paiera pour le supprimer. Le philosophe tonne contre le cynique, lui reproche son ingratitude, puis s’attendrit sur un état de misère qui l’accule à de tels moyens. Finalement, il lui conseille de porter son pamphlet au vieux duc d’Orléans, qui est fort dévot, qui le hait et qui récompensera cette infamie. Et comme l’impudent personnage est embarrassé d’écrire la dédicace au duc, Diderot la rédige lui-même.

Cette bonté, on la nargue. Diderot s’intéressait à un jeune avocat, nommé Rivière, de belle figure, sensible d’apparence, très pauvre, et qui avait eu le malheur d’indisposer contre lui son frère, un riche abbé. À peine a-t-il reçu cet aveu, Diderot court chez l’ecclésiastique. À force d’éloquence, de pathétique, il lui arrache la promesse d’assurer une rente de six cents livres à son frère. Hélas ! Il vient d’obliger le plus insolent des ingrats. Rivière le remercie, prend congé, puis se retournant sur l’escalier : « Monsieur Diderot, vous qui savez tout,