Page:Corday - La Vie amoureuse de Diderot.djvu/27

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lui demande de faire violence à ses habitudes. J’insiste pour retenir son attention. N’est-il pas nécessaire de lui montrer que Denis Diderot apportait à Nanette Champion un cœur tout neuf ?

Il avait aimé, mais comme on aime à seize ans. C’est à cet âge-là que les Jésuites de Langres lui proposèrent de partir pour Paris. Certes, ils désiraient cultiver au mieux cette riche intelligence qui pourrait illustrer et servir leur maison. Mais sans doute entendaient-ils aussi l’éloigner d’une jeune fille dont il commençait à s’éprendre. Les notes données vers cette époque à l’écolier ont gardé la trace de cette alerte. Elles signalent le péril en trois mots, bien significatifs dans le langage ecclésiastique : « Trop de sensibilité », disent-elles.

Elle mourut jeune, celle qui avait éveillé son cœur. Bien des années après, dans un voyage à Langres, Diderot rencontra une des amies de la disparue, ils se promenèrent ensemble, en parlant d’elle. Et comme ils passaient devant le cimetière, cette femme, sans un mot, tourna la tête et lui désigna de la main l’endroit où reposait son premier amour.