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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/377

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COMPLÉMENT
DES VARIANTES.


1010[1][Ah ! si mon fou de frère en pouvoît faire autant,]

Qu’en ce plaisant malheur je serois satisfaite !
Si je puis découvrir le lieu de sa retraite,
Et qu’il me veuille croire, éteignant tous ses feux,
Nous passerons le temps à ne rire que d’eux.
Je la ferai rougir, cette jeune éventée,
Lorsque, son écriture à ses yeux présentée
Mettant au jour un crime estimé si secret,
Elle reconnoîtra qu’elle aime un indiscret.
Je lui veux dire alors, pour aggraver l’offense,
Que Philandre, avec moi toujours d’intelligence,
Me fait des contes d’elle et de tous les discours
Qui servent d’aliment à ses vaines amours ;
Si qu’à peine il reçoit de sa part une lettre[2],
Qu’il ne vienne en mes mains aussitôt la remettre.
La preuve captieuse et faite en même temps
Produira sur-le-champ l’effet que j’en attends.

SCÈNE VI.
PHILANDRE.

Donc pour l’avoir tenu si longtemps en haleine,
Il me faudra souffrir une éternelle peine,
Et payer désormais avecque tant d’ennui
Le plaisir que j’ai pris à me jouer de lui ?
Vit-on jamais amant dont la jeune insolence
Malmenât un rival avec tant d’imprudence ?
Vit-on jamais amant dont l’indiscrétion
Fût de tel préjudice à son affection ?
Les lettres de Mélite en ses mains demeurées,
En ses mains, autant vaut, à jamais égarées,
Ruinent à la fois ma gloire, mon honneur.
Mes desseins, mon espoir, mon repos et mon heur.
Mon trop de vanité tout au rebours succède :

  1. Le chiffre place au commencement d’une variante marque à quel vers du texte elle se rapporte.
  2. Si bien qu’il en reçoit à grand’peine une lettre. (1644-57)