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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/445

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ACTE III, SCÈNE II.
CALISTE.

7C’est ainsi que le Roi, te refusant, t’oblige[1] :
Il te donne beaucoup en ce qu’il t’interdit,
Et tu gagnes beaucoup d’y perdre ton crédit.
On voit dans ces refus une marque certaine[2]
Que contre Rosidor toute prière est vaine.
7Ses violents transports sont d’assurés témoins
Qu’il t’écoutoroit mieux s’il te chérissoit moins.
Mais un plus long séjour pourroit ici te nuire[3] :
Ne perdons plus de temps ; laisse-moi te conduire[4]
Jusque dans l’antichambre où Lysarque t’attend,
7Et montre désormais un esprit plus content.

ROSIDOR.

Si près de te quitter…

CALISTE.

Si près de te quitter…N’achève pas ta plainte.
Tous deux nous ressentons cette commune atteinte ;
Mais d’un fâcheux respect la tyrannique loi
M’appelle chez la Reine et m’éloigne de toi.
7Il me lui faut conter comme l’on m’a surprise,
Excuser mon absence en accusant Dorise ;
Et lui dire comment, par un cruel destin[5],
Mon devoir auprès d’elle a manqué ce matin.

ROSIDOR.

Va donc, et quand son âme, après la chose sue,
7Fera voir la pitié qu’elle en aura conçue,
Figure-lui si bien Clitandre tel qu’il est.
Qu’elle n’ose en ses feux prendre plus d’intérêt.

  1. Var. Mon cœur, ainsi le Roi, te refusant, t’oblige. (1632-57)
  2. Var. Vois dedans ces refus une marque certaine. (1632-57)
  3. Var. Mais un plus long séjour ici te pourroit nuire. (1632-60)
  4. Var. Viens donc, mon cher souci, laisse-moi te conduire. (1632-57)
  5. Var. Et l’informer comment, par un cruel destin. (1632-64)