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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/464

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CLITANDRE.

On déjà dispersés par l’ardeur de la chasse,
1110Ont dérobé leur tête à sa fière menace.
Cependant seul, à pied, je pense à tous moments
Voir le dernier débris de tous les éléments,
Dont l’obstination à se faire la guerre
Met toute la nature au pouvoir du tonnerre.
1115Dieux, si vous témoignez par là votre courroux,
De Clitandre ou de moi lequel menacez-vous ?
La perte m’est égale, et la même tempête
Qui l’auroit accablé tomberoit sur ma tête.
Pour le moins, justes Dieux, s’il court quelque danger[1],
1120Souffrez que je le puisse avec lui partager.
J’en découvre à la fin quelque meilleur présage ;
L’haleine manque aux vents, et la force à l’orage ;
Les éclairs, indignés d’être éteints par les eaux,
En ont tari la source et séché les ruisseaux ;
1125Et déjà le soleil de ses rayons essuie
Sur ces moites rameaux le reste de la pluie.
Au lieu du bruit affreux des foudres décochés,
Les petits oisillons, encor demi-cachés[2]
Mais je verrai bientôt quelques-uns de ma suite :
Je le juge à ce bruit.

  1. Var. Pour le moins, Dieux, s’il court quelque danger fatal.
    Qu’il en ait comme moi plus de peur que de mal. (1632-57)
  2. Var. [Les petits oisillons, encor demi-cachés,]
    Poussent en tremblotant, et hasardent à peine
    Leur voix, qui se dérobe à la peur incertaine
    Qui tient encor leur âme et ne leur permet pas
    De se croire du tout préservés du trépas.
    J’aurai bientôt ici quelques-uns de ma suite. (1632-57)