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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 1.djvu/479

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ACTE V, SCÈNE II.

1375Mon feu qu’elle alluma fût mort au premier jour,
S’il n’eût été nourri d’un réciproque amour.
Oui, Caliste, et je veux toujours qu’il m’en souvienne,
J’aperçus aussitôt ta flamme que la mienne :
L’amour apprit ensemble à nos cœurs à brûler ;
1380L’amour apprit ensemble à nos yeux à parler ;
Et sa timidité lui donna la prudence
De n’admettre que nous en notre confidence :
Ainsi nos passions se déroboient à tous ;
Ainsi nos feux secrets n’ayant point de jaloux[1]
1385Mais qui vient jusqu’ici troubler mes rêveries ?


Scène III.

ROSIDOR, CALISTE.
CALISTE.

Celle qui voudroit voir tes blessures guéries,
Celle…

ROSIDOR.

Celle…Ah ! mon heur, jamais je n’obtiendrois sur moi
De pardonner ce crime à tout autre[2] qu’à toi.
De notre amour naissant la douceur et la gloire
1390De leur charmante idée occupoient ma mémoire :
Je flattois ton image, elle me reflattoit ;
Je lui faisois des vœux, elle les acceptoit ;
Je formois des désirs, elle en aimoit l’hommage.
La désavoueras-tu, cette flatteuse image ?
1395Voudras-tu démentir notre entretien secret ?
Seras-tu plus mauvaise enfin que ton portrait ?

CALISTE.

Tu pourrois de sa part te faire tant promettre,

  1. Voyez au Complément des variantes, p. 367.
  2. Il y a tout autre, au masculin, dans toutes les éditions qui ont ce texte. Voyez ci-dessus, p. 228, note (a).