Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 10.djvu/385

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tience, car il en sait plus que personne ; mais le diable le poussa de mettre au jour son roman allégorique de la philosophie des Stoïciens. Il est intitulé : Macarise, reine des îles Fortunées…

« L’abbé d’Aubignac a fait mettre son portrait au devant du livre, avec ces quatre vers, qui apparemment sont de son frère. Il a l’honneur d’en faire aussi mal qu’un autre pour le moins :

Il a mille vertus, il connoît les beaux-arts,
Il étouffe l’envie à ses pieds abattue ;
Et Rome à son mérite, au siècle des Césars,
Au lieu de cette image eût dressé sa statue.

« Corneille, ou quelque corneillien, a fait cet autre quatrain pour mettre à la place du premier :

Il a mille vertus, ce pitoyable auteur,
Et deux mille secrets pour apprendre à déplaire ;
Quiconque veut s’instruire au grand art de mal faire
N’a qu’à prendre leçon d’un si rare docteur.

« Corneille fit encore le madrigal qui suit :

épigramme

Cette foule d’approbateurs[1]
Qui met à si haut prix ta docte allégorie,
Comme elle a ton œuvre enchérie,
Épouvante les acheteurs.
Tu crois que le papier et l’encre qu’il t’en coûte
De l’immortalité t’ouvrent la grande route,
Et que tant de grands noms feront vivre ton nom ;
Mais n’en déplaise à ta doctrine,
Plus on étaye une maison,
Plus elle est près de sa ruine[2].

« Celle-ci est de Cottin :

Ce roman sans exemple en nos mains est tombé ;
Mais j’en trouve l’auteur difficile à connoître :

  1. Tallemant a raconté un peu plus haut dans un long passage que nous avons supprimé, comme peu utile à notre objet, que la moitié du premier volume était occupée par les éloges des amis de d’Aubignac.
  2. « Il y a au bas du quatrain Acheman ; c’est quelque nom retourné. » (Note de Tallemant.) — On voit que l’auteur des Historiettes contredit lui-même dans cette note, postérieure, il est vrai, à son texte, l’assertion qui attribue cette épigramme à Corneille.