Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/134

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notre pièce aura beau être régulière, si elle est sifflée au théâtre, les savants n’oseront se déclarer en notre faveur, et aimeront mieux dire que nous aurons mal entendu les règles, que de nous donner des louanges quand nous serons décriés par le consentement général de ceux qui ne voient la comédie que pour se divertir. Je suis,

MONSIEUR,
votre très humble serviteur,
Corneille.

EXAMEN

Je ne dirai pas grand mal de celle-ci[1], que je tiens assez régulière, bien qu’elle ne soit pas sans taches. Le style en est plus faible que celui des autres. L’amour de Géraste pour Florise n’est point marqué dans le premier acte, et ainsi la protase comprend la première scène du second, où il se présente avec sa confidente Célie, sans qu’on les connaisse ni l’un ni l’autre. Cela ne serait pas vicieux s’il ne s’y présentait que comme père de Daphnis, et qu’il ne s’expliquât que sur les intérêts de sa fille ; mais il en a de si notables pour lui, qu’ils font le nœud et le dénouement. Ainsi c’est un défaut, selon moi, qu’on ne le connaisse pas dès ce premier acte. Il pourrait être encore souffert, comme Célidan dans la Veuve, si Florame l’allait voir pour le faire consentir à son mariage avec sa fille, et que par occasion il lui proposât celui de sa sœur pour lui-même ; car alors ce


  1. Pour se rendre bien compte de ce pronom (celle-ci), il faut relire la dernière phrase de l’Examen de la Galerie du Palais (p. 15), et se reporter à la note 1 de la p. 137 du tome I.