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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/185

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Géraste.

Où les conditions n’ont point d’égalité,
L’amour ne se fait guère avec sincérité.

Amarante.

Posé que cela soit : Clarimond me caresse ;
Mais si je vous disais que c’est pour ma maîtresse,
Et que le seul besoin qu’il a de mon secours,
Sortant d’avec Daphnis, l’arrête en mes discours ?

Géraste.

S’il a besoin de toi pour avoir bonne issue,
C’est signe que sa flamme est assez mal reçue.

Amarante.

Pas tant qu’elle paraît, et que vous présumez.
D’un mutuel amour leurs cœurs sont enflammés ;
Mais Daphnis se contraint, de peur de vous déplaire,
Et sa bouche est toujours à ses désirs contraire,
Hormis lorsqu’avec moi s’ouvrant confidemment,
Elle trouve à ses maux quelque soulagement.
Clarimond cependant, pour fondre tant de glaces,
Tâche par tous moyens d’avoir mes bonnes grâces ;
Et moi je l’entretiens toujours d’un peu d’espoir.

Géraste.

À ce compte, Daphnis est fort dans le devoir :
Je n’en puis souhaiter un meilleur témoignage,
Et ce respect m’oblige à l’aimer davantage.
Je lui serai bon père, et puisque ce parti
À sa condition se rencontre assorti,
Bien qu’elle pût encore un peu plus haut atteindre,
Je la veux enhardir à ne se plus contraindre.

Amarante.

Vous n’en pourrez jamais tirer la vérité.
Honteuse de l’aimer sans votre autorité,