Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/328

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

lleux !

Au retour d’Italie être encor scrupuleux !

Les Dieux, s’ils n’étaient bons, puniraient cette feinte :

C’est ne les craindre pas qu’abuser de leur crainte.

Offrez-leur seulement, avec un peu d’encens,

Une âme pure et nette et des vœux innocents,

Et ne présumez pas qu’aucun d’eux s’intéresse

Par quels yeux un amant choisisse une maîtresse.

Ceux d’un autre vous-même employés à ce choix

De votre vieil rêveur ne faussent point les lois ;

Les vôtres et les miens ne sont que même chose ;

Que sur mon amitié votre esprit se repose.

Vous savez que mon cœur est à vous tout entier,

Que je vous tiens pour fils et pour seul héritier,

Que pour vous assurer d’un amour plus sincère

Je quitte le nom d’oncle et prends celui de père,

Qu’en vos prospérités j’arrête mes désirs,

Qu’à vos contentements j’attache mes plaisirs,

Et que mon sort du vôtre étant inséparable,

Je ne puis être heureux et vous voir misérable.

Puisque de vos malheurs je sentirais les cous,

Craignez-vous que je fasse un mauvais choix pour vous ?

Celle à qui ma prudence aujourd’hui vous engage

Rangerait sous ses lois l’homme le plus sauvage :

Sa beauté ravissante et son esprit charmant

Malgré vous, dès l’abord, vous feront son amant ;

Elle est sage, elle est riche.

Aglante

Elle est inestimable ;

Mais donnez-moi loisir de la trouver aimable :

Un regard y suffit, et rien ne fait aimer

Qu’un certain mouvement qu’on ne peut exprimer,

Un prompt saisissement, une atteinte impourvue

Qui nous blesse le cœur en nous frappant