Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/387

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Et sans le posséder ne me vois-je pas reine ?
Grâces aux immortels, dans ma condition
J’ai de quoi m’assouvir de cette ambition :
Je ne veux point changer mon sceptre contre un autre ;
Je perdrais ma couronne en acceptant la vôtre.
Corinthe est bon sujet, mais il veut voir son roi,
Et d’un prince éloigné rejetterait la loi.
Joignez à ces raisons qu’un père un peu sur l’âge,
Dont ma seule présence adoucit le veuvage,
Ne saurait se résoudre à séparer de lui
De ses débiles ans l’espérance et l’appui,
Et vous reconnaîtrez que je ne vous préfère
Que le bien de l’État, mon pays et mon père.
Voilà ce qui m’oblige au choix d’un autre époux ;
Mais comme ces raisons font peu d’effet sur vous,
Afin de redonner le repos à votre âme,
Souffrez que je vous quitte.

Ægée, seul.

Souffrez que je vous quitte. Allez, allez, madame,
Étaler vos appas et vanter vos mépris
À l’infâme sorcier qui charme vos esprits.