Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 2.djvu/408

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Echauffait mon courage et conduisait mes mains :
J’ai suivi, mais de loin, des actions si belles,
Qui laissaient à mon bras tant d’illustres modèles.
Pourrait-on reculer en combattant sous vous,
Et n’avoir point de cœur à seconder vos coups ?

Créon.

Votre valeur, qui souffre en cette repartie,
Ote toute croyance à votre modestie :
Mais puisque le refus d’un honneur mérité
N’est pas un petit trait de générosité,
Je vous laisse en jouir. Auteur de la victoire,
Ainsi qu’il vous plaira, départez-en la gloire ;
Comme elle est votre bien, vous pouvez la donner.
Que prudemment les dieux savent tout ordonner !
Voyez, brave guerrier, comme votre arrivée
Au jour de nos malheurs se trouve réservée,
Et qu’au point que le sort osait nous menacer,
Ils nous ont envoyé de quoi le terrasser.
Digne sang de leur roi, demi-dieu magnanime,
Dont la vertu ne peut recevoir trop d’estime,
Qu’avons-nous plus à craindre ? et quel destin jaloux,
Tant que nous vous aurons, s’osera prendre à nous ?

Pollux.

Appréhendez pourtant, grand prince,

Créon.

Appréhendez pourtant, grand prince, Et quoi ?

Pollux.

Appréhendez pourtant, grand prince, Et quoi ? Médée,
Qui par vous de son lit se voit dépossédée.
Je crains qu’il ne vous soit malaisé d’empêcher