Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/161

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Et je n’entreprends pas, à force de parler,
Ni de vous adoucir, ni de vous consoler.
Mais si de vous servir je puis être capable,
Employez mon épée à punir le coupable ;
Employez mon amour à venger cette mort :
Sous vos commandements mon bras sera trop fort.

Chimène.

Malheureuse !

Don Sanche.

Malheureuse ! De grâce, acceptez mon service[1].

Chimène.

J’offenserois le Roi, qui m’a promis justice.

Don Sanche.

Vous savez qu’elle marche avec tant de langueur,
Qu’assez souvent le crime échappe à sa longueur[2] ;
Son cours lent et douteux fait trop perdre de larmes.
Souffrez qu’un cavalier vous venge par les armes[3].
La voie en est plus sûre, et plus prompte à punir.

Chimène.

C’est le dernier remède ; et s’il y faut venir,
Et que de mes malheurs cette pitié vous dure,
Vous serez libre alors de venger mon injure.

Don Sanche.

C’est l’unique bonheur où mon âme prétend ;
Et pouvant l’espérer, je m’en vais trop content.

  1. Var. Madame, acceptez mon service. (1637-60)
  2. Var. Que bien souvent le crime échappe à sa longueur. (1637-56)
  3. Var. Souffrez qu’un chevalier vous venge par les armes.
    (1637 in-4o. 38 P., 39 et 44)