Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/207

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Sire, j’y suis venu : cet objet l’a trompée ;
Elle m’a cru vainqueur, me voyant de retour,
Et soudain sa colère a trahi son amour
Avec tant de transport et tant d’impatience,
Que je n’ai pu gagner un moment d’audience.
EtPour moi, bien que vaincu, je me répute heureux ;
Et malgré l’intérêt de mon cœur amoureux,
Perdant infiniment, j’aime encor ma défaite,
Qui fait le beau succès d’une amour si parfaite.

Don Fernand.

Ma fille, il ne faut point rougir d’un si beau feu,
Ni chercher les moyens d’en faire un désaveu.
Une louable honte en vain t’en sollicite[1] :
Ta gloire est dégagée, et ton devoir est quitte ;
Ton père est satisfait, et c’étoit le venger
Que mettre tant de fois ton Rodrigue en danger.
Tu vois comme le ciel autrement en dispose.
Ayant tant fait pour lui, fais pour toi quelque chose,
Et ne sois point rebelle à mon commandement,
Qui te donne un époux aimé si chèrement.


Scène VII[2].

DON FERNAND, DON DIÈGUE, DON ARIAS, DON RODRIGUE, DON ALONSE, DON SANCHE, L’INFANTE, CHIMÈNE, LÉONOR, ELVIRE.
L’Infante.

Sèche tes pleurs, Chimène, et reçois sans tristesse
Ce généreux vainqueur des mains de ta princesse.

Don Rodrigue.

Ne vous offensez point, Sire, si devant vous

  1. Var. Une louable honte enfin t’en sollicite, (1637, 38 P., 39 et 44)
  2. Var. scène dernière. (1644 in-12)