Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 3.djvu/392

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ce qui m’a fait rompre la liaison des scènes au quatrième acte, n’ayant pu me résoudre à faire que Maxime vînt donner l’alarme à Émilie de la conjuration découverte, au lieu même où Auguste en venait de recevoir l’avis par son ordre, et dont il ne faisoit que de sortir avec tant d’inquiétude et d’irrésolution. C’eût été une impudence extraordinaire, et tout à fait hors du vraisemblable, de se présenter dans son cabinet un moment après qu’il lui avait fait révéler le secret de cette entreprise[1] et porter la nouvelle de sa fausse mort. Bien loin de pouvoir surprendre Émilie par la peur de se voir arrêtée, c’eût été se faire arrêter lui-même, et se précipiter dans un obstacle invincible au dessein qu’il voulait exécuter. Émilie ne parle donc pas où parle Auguste, à la réserve du cinquième acte ; mais cela n’empêche pas qu’à considérer tout le poème ensemble, il n’ait son unité de lieu, puisque tout s’y peut passer, non seulement dans Rome ou dans un quartier de Rome, mais dans le seul palais d’Auguste, pourvu que vous y vouliez donner un appartement à Émilie qui soit éloigné du sien.

    constance d’une grande conspiration contre Auguste, et qu’Auguste y tienne un conseil de confidence avec ses deux favoris ; car si c’est un lieu public, comme il le semble, puisqu’Auguste en fait retirer les autres courtisans, quelle apparence que Cinna vienne y faire visite à Émilie avec un entretien et un récit de chose si périlleuse, qui pouvoient être entendues de ceux de la cour qui passoient en ce lieu ? Et ci c’est un lieu particulier, par exemple le cabinet de l’Empereur, qui en fait retirer ceux qu’il ne veut pas rendre participants de son secret, comment est-il vraisemblable qu’il soit venu faire ce discours à Émilie ? et moins encore qu’Émilie y fasse des plaintes enragées contre l’Empereur ? Voilà une difficulté que Monsieur Corneille résoudra quand il lui plaira. » (La pratique du théâtre, p. 396 et 397.)

  1. Var. (édit. de 1660 et de 1663) : de cette entreprise, dont il étoit un des chefs. — Le reste de la phrase manque dans l’édition de 1660, qui continue ainsi : « et bien loin de pouvoir, etc »