Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/368

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Ou descendant du ciel, prend d’une autre[1] l’aimant,
La sienne a pris le vôtre, et vous a rencontrée.

MÉLISSE.

Quoi ? tu lis les romans ?

LYSE.

Quoi ? tu lis les romans ?Je puis bien lire Astrée[2] ;
Je suis de son village[3], et j’ai de bons garants
1240Qu’elle et son Céladon étoient de nos parents[4].

MÉLISSE.

Quelle preuve en as-tu ?

LYSE.

Quelle preuve en as-tu ?Ce vieux saule, Madame,
Où chacun d’eux cachoit ses lettres et sa flamme,
Quand le jaloux Sémire en fit un faux témoin[5] ;

    livre de la seconde partie de l’Astrée, il grave un cadran « dont l’aiguille tremblante tournoit du côté de la tramontane, avec ce mot : J’EN SUIS TOUCHÉ : voulant signifier que tout ainsi que l’aiguille du cadran étant touchée de l’aimant se tourne toujours de ce côté-là (parce que les plus savants ont opinion que, s’il faut dire ainsi, l’élément de la calamite y est), par cette puissance naturelle, qui fait que toute partie recherche de se rejoindre à son tout ; de même son cœur atteint des beautés de sa maîtresse, tournoit incessamment toutes ses pensées vers elle. Et pour mieux faire entendre cette conception, il ajouta ces vers :

    MADRIGAL.

    L’aiguille du cadran cherche la tramontane

    Touchée avec l’aimant,

    Mon cœur aussi touché des beautés de Diane

    La cherche incessamment. »

  1. La leçon d’une autre n’est que dans les éditions de 1664 et de 1668. Toutes les autres donnent : d’un autre. Voyez tome I, p. 228, note 3 a. — L’édition de 1692 a le féminin, qui, de toute manière, paraît ici préférable.
  2. L’Astrée, célèbre roman pastoral d’Honoré d’Urfé, divisé en cinq parties, dont la première a paru en 1610 et la dernière en 1625. Cette édition ne se trouve plus, dit M. Brunet en parlant de la 1re  partie de 1610, in-4o, dédiée à Henri IV.
  3. Le village d’Astrée n’est pas nommé par d’Urfé, qui se contente de placer le lieu de la scène dans le Forez, sur les bords du Lignon.
  4. Var. Qu’elle et son Céladon étoient de mes parents. (1645-68)
  5. D’Urfé dit, dès les premières pages de son roman, qu’Astrée et Céladon « se virent poussés par les trahisons de Semyre aux plus profondes infortunes, » mais il ne donne point de détails particuliers à ce sujet, et, dans la Tragico-