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Et si vous bornez là toute votre vengeance,
Vos desirs et les miens seront d’intelligence.
C’est ainsi qu’on déguise un violent dépit ;
C’est ainsi qu’une feinte au dehors l’assoupit[2],
Et qu’on croit amuser de fausses patiences
Ceux dont en l’âme on craint les justes défiances.
Quoi ? je conserverois quelque courroux secret !
Quoi ? lâche, tu pourrois la perdre sans regret ?
Elle de qui les Dieux te donnoient l’hyménée ?
Elle dont tu plaignois la perte imaginée ?
Considérer sa perte avec compassion,
Ce n’est pas aspirer à sa possession.
Que la mort la ravisse, ou qu’un rival l’emporte,
La douleur d’un amant est également forte ;
Et tel qui se console après l’instant fatal[3],
Ne sauroit voir son bien aux mains de son rival :
Piqué jusques au vif, il tâche à le reprendre,
Il fait de l’insensible, afin de mieux surprendre ;
D’autant plus animé que ce qu’il a perdu
Par rang ou par mérite à sa flamme étoit dû.
Peut-être ; mais enfin par quel amour de mère
Pressez-vous tellement ma douleur contre un frère ?
Prenez-vous intérêt à la faire éclater ?