Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 4.djvu/521

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Et pour vous souhaiter tous les malheurs ensemble,
Puisse naître de vous un fils qui me ressemble[1] !

ANTIOCHUS.

1825Ah ! vivez, pour changer cette haine en amour !

CLÉOPATRE.

Je maudirois les dieux s’ils me rendoient le jour.
Qu’on m’emporte d’ici : je me meurs, Laonice.
Si tu veux m’obliger par un dernier service,
Après les vains efforts de mes inimitiés,
1830Sauve-moi de l’affront de tomber à leurs pieds.

(Elle s’en va, et Laonice lui aide à marcher.)
ORONTE.

Dans les justes rigueurs d’un sort si déplorable[2],
Seigneur, le juste ciel vous est bien favorable :
Il vous a préservé, sur le point de périr,
Du danger le plus grand que vous puissiez courir :
1835Et par un digne effet de ses faveurs puissantes,
La coupable est punie et vos mains innocentes.

ANTIOCHUS.

Oronte, je ne sais, dans son funeste sort,
Qui m’afflige le plus, ou sa vie, ou sa mort ;
L’une et l’autre a pour moi des malheurs sans exemple :
1840Plaignez mon infortune. Et vous, allez au temple
Y changer l’allégresse en un deuil sans pareil,
La pompe nuptiale en funèbre appareil ;
Et nous verrons après, par d’autres sacrifices,
Si les Dieux voudront être à nos vœux plus propices.

FIN DU CINQUIÈME ET DERNIER ACTE.
  1. Corneille paraît se rappeler ici un passage de la Médée de Sénèque dont
    il n’avait pas profité en traitant ce sujet :
    Quoque non aliud queam
    Pejus precari, liberos similes patri
    Similesque matri.
    (Acte I, scène i, vers 23-25.)
  2. Var. Encor dans les rigueurs d’un sort si déplorable. (1647-56)