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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/180

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Phocas

À ce compte, arrogante, un fantôme nouveau
Qu’un murmure confus fait sortir du tombeau,
Te donne cette audace et cette confiance !
Ce bruit s’est fait déjà digne de ta croyance.
Mais…

Pulchérie

Je sais qu’il est faux : pour t’assurer ce rang
Ta rage eut trop de soin de verser tout mon sang.
Mais la soif de ta perte, en cette conjoncture,
Me fait aimer l’auteur d’une belle imposture :
Au seul nom de Maurice il te fera trembler ;
Puisqu’il se dit son fils, il veut lui ressembler,
Et cette ressemblance où son courage aspire
Mérite mieux que toi de gouverner l’empire.
J’irai par mon suffrage affermir cette erreur,
L’avouer pour mon frère et pour mon empereur,
Et dedans son parti jeter tout l’avantage
Du peuple convaincu par mon premier hommage.
Toi, si quelque remords te donne un juste effroi,
Sors du trône, et te laisse abuser comme moi.
Prends cette occasion de te faire justice.

Phocas

Oui, je me la ferai bientôt par ton supplice.
Ma bonté ne peut plus arrêter mon devoir :
Ma patience a fait par delà son pouvoir.
Qui se laisse outrager mérite qu’on l’outrage,
Et l’audace impunie enfle trop un courage.
Tonne, menace, brave, espère en de faux bruits,
Fortifie, affermis ceux qu’ils auront séduits,
Dans ton âme à ton gré change ma destinée,
Mais choisis pour demain la mort ou l’hyménée.

Pulchérie

Il n’est pas pour ce choix besoin d’un grand effort