Ah, Prince ! J’y courais sans me plaindre du sort.
Son indigne rigueur n’est pas ce qui me touche ;
Mais en ouïr l’arrêt sortir de votre bouche !
Je vous ai mal connu jusques à mon trépas.
Et même en ce moment tu ne me connais pas.
Ecoute, père aveugle, et toi, prince crédule,
Ce que l’honneur défend que plus je dissimule.
Phocas, connais ton sang et tes vrais ennemis :
Je suis Héraclius, et Léonce est ton fils.
Seigneur, que dites-vous ?
Que je ne puis plus taire
Que deux fois Léontine osa tromper ton père,
Et semant de nos noms un insensible abus,
Fit un faux Martian du jeune Héraclius.
Maurice te dément, lâche ! Tu n’as qu’à lire :
« Sous le nom de Léonce Héraclius respire" ;
Tu fais après cela des contes superflus.
Si ce billet fut vrai, Seigneur, il ne l’est plus:
J’étais Léonce alors, et j’ai cessé de l’être
Quand Maurice immolé n’en a pu rien connaître.
S’il laissa par écrit ce qu’il avait pu voir,
Ce qui suivit sa mort fut hors de son pouvoir.
Vous portâtes soudain la guerre dans la Perse,
Où vous eûtes trois ans la fortune diverse ;
Cependant Léontine, étant dans le château
Reine de nos destins et de notre berceau,
Pour me rendre le rang qu’occupait votre race,