Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/228

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Ce n’est que pour mourir que je te le demande.
Reprends ce triste jour que tu m’as racheté,
Ou rends-moi cet honneur que tu m’as presque ôté.

Martian

Pourquoi, de mon tyran volontaire victime,
Précipiter vos jours pour me noircir d’un crime ?
Prince, qui que je sois, j’ai conspiré sa mort,
Et nos noms au dessein donnent un divers sort ;
Dedans Héraclius il a gloire solide,
Et dedans Martian il devient parricide.
Puisqu’il faut que je meure illustre, ou criminel,
Couvert ou de louange, ou d’opprobre éternel,
Ne souillez point ma mort, et ne veuillez pas faire
Du vengeur de l’empire un assassin d’un père.

Héraclius

Mon nom seul est coupable, et, sans plus disputer,
Pour te faire innocent tu n’as qu’à le quitter ;
Il conspira lui seul, tu n’en es point complice.
Ce n’est qu’Héraclius qu’on envoie au supplice.
Sois son fils, tu vivras.

Martian

Si je l’avais été,
Seigneur, ce traître en vain m’aurait sollicité,
Et, lorsque contre vous il m’a fait entreprendre,
La nature en secret aurait su m’en défendre.

Héraclius

Apprends donc qu’en secret mon cœur t’a prévenu.
J’ai voulu conspirer, mais on m’a retenu ;
Et dedans mon péril Léontine timide…

Martian

N’a pu voir Martian commettre un parricide.