Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 5.djvu/482

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Et lui-même il en donne assez de connaissance,
Abandonnant la reine à choisir parmi vous
Un roi pour la Castille, et pour elle un époux.

DOM MANRIQUE

Et ne voyez-vous pas que sa valeur s’apprête
À faire sur tous trois cette illustre conquête ?
Oubliez-vous déjà qu’il a dit à vos yeux
Qu’il ne veut rien devoir au nom de ses aïeux ?
Son grand cœur se dérobe à ce haut avantage,
Pour devoir sa grandeur entière à son courage;
Dans une cour si belle et si pleine d’appas,
Avez-vous remarqué qu’il aime en lieu plus bas ?

DONA LÉONOR

Le voici : nous saurons ce que lui-même en pense.



Scène 2




CARLOS

Madame, sauvez-moi d’un honneur qui m’offense :
Un peuple opiniâtre à m’arracher mon nom
Veut que je sois Dom Sanche, et prince d’Aragon.
Puisque par sa présence il faut que ce bruit meure,
Dois-je être, en l’attendant, le fantôme d’une heure ?
Ou si c’est une erreur qui lui promet ce roi,
Souffrez-vous qu’elle abuse et de vous et de moi ?

DONA LÉONOR

Quoi que vous présumiez de la voix populaire,
Par de secrets rayons le ciel souvent l’éclaire :
Vous apprendrez par là du moins les vœux de tous,
Et quelle opinion les peuples ont de vous.