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Page:Corneille, Pierre - Œuvres, Marty-Laveaux, 1862, tome 6.djvu/171

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ACTE II, SCÈNE II.

Qu’il espère de vous quelque chose à son tour.

Dircé.

5S’il a cru m’éblouir par de fausses caresses,
J’ai vu sa politique en former les tendresses ;
Et ces amusements de ma captivité
Ne me font rien devoir à qui m’a tout ôté.

Mégare.

Vous voyez que d’Æmon il a pris la querelle,
Qu’il l’estime, chérit.

Dircé.

Qu’il l’estime, chérit.Politique nouvelle.

Mégare.

Mais comment pour Thésée en viendrez-vous à bout ?
Il le méprise, hait.

Dircé.

Il le méprise, hait.Politique partout.
Si la flamme d’Æmon en est favorisée,
Ce n’est pas qu’il l’estime, ou méprise Thésée ;
C’est qu’il craint dans son cœur que le droit souverain
(Car enfin il m’est dû) ne tombe en bonne main.
Comme il connoît le mien, sa peur de me voir reine
Dispense à mes amants sa faveur ou sa haine,
Et traiterait ce prince ainsi que ce héros,
S’il portoit la couronne ou de Sparte ou d’Argos.

Mégare.

Si vous en jugez bien, que vous êtes à plaindre !

Dircé.

Il fera de l’éclat, il voudra me contraindre ;
Mais quoi qu’il me prépare à souffrir dans sa cour,
Il éteindra ma vie avant que mon amour.

Mégare.

Espérons que le ciel vous rendra plus heureuse.
Cependant je vous trouve assez peu curieuse :
Tout le peuple, accablé de mortelles douleurs,